Porcus diabolicus

Le cochon fait partie de la société humaine, il est présent dans diverses religions, qu’il soit vecteur de lien social comme avec la fête de saint- Antoine dans le christianisme ou source de répugnance dans la religion islamique et le judaïsme. Apprécié pour l’utilisation complète que l’on en fait de manière alimentaire, le porc devient symbole de lien rural et de réaction anti-capitaliste avec le rôle du tueur de cochon permettant une autonomie et une auto-gestion alimentaire dans les campagnes. 
D’un point de vue industriel, le porc est toujours caché même si très présent dans divers produits de consommation. La nature horrible de la mort animale est marginalisée avec l’excentration des abattoirs, l’omerta de leurs fonctionnements ou encore le maquillage des produits alimentaires, comme le nitrite servant à donner une couleur appétissante au jambon. 
Pourtant le porc, et de manière plus large le bétail, a aussi servi au développement de l’architecture et des voiries humaine. Le réseau ferroviaire américain fut initialement pensé pour amener des plaines le bétail jusqu’à la plateforme d’abattage que fut Chicago. De même que le quartier de la Villette à Paris fut repensé par le Baron Haussman comme une zone de centralisation et d’abattage du bétail entrant dans la capitale. 
De manière plus intime, le porc partage une grande similitude avec l’humain. Nous l’utilisons pour son insuline et même pour remplacer nos valves cardiaques. Lorsque l'Église refusait la dissection d'humain pour la découverte médicale, c'était sur les cochons que s'entrainaient les chirurgiens et médecins, le corps du porc et le corps de l’humain se confondant dans leur proximité. 
C’est donc à partir de trois points issus de ces recherches et de ce que le porc dit de nos cultures, de notre histoire, de notre industrie et de notre anatomie qu’est née cette pièce. Porcus Diabolicus, du nom donné au porc régicide du roi Philippe au VIIe siècle, est une sculpture lumineuse dont la lumière bat faiblement comme un coeur. Elle tend à constater la place qu’a le cochon auprès de l’humain par le prisme narratif de son omniprésence dissimulée, de sa capacité à créer des connexions sociales, géographiques et urbaines et du parallèle biologique qui existe entre l’humain et porc. 

-2021-
Crédit photographe : Alexandre Texier, Thibault Philip.